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pumpernickel

commentaires satiriques de l'actualité wissembourgeoise

C'est en rangeant mon désordre …

… que je suis tombé sur cette lettre écrite le 27 mars 2007, alors que la radio de service public était “ en région ”, comme ils disent et que le téléphone sonnait de Strasbourg.

Lettre à l'équipe de l'émission “ le téléphone sonne ”, adressée à Claire.BOUBE@radiofrance.com

Madame, Monsieur,

Au moment où vous recevrez Richard Kleinschmager, géographe, vice-président de l'Université Louis Pasteur, auteur de "Géopolitique de l'Alsace", Christophe Beck, rédacteur en chef de France Bleu Alsace et Dominique Jung, rédacteur en chef des Dernières Nouvelles d'Alsace autour du micro du téléphone qui sonne, je serai à l'Hôtel de ville de Wissembourg pour assister, sur les bancs du public, à la séance du conseil municipal consacrée au vote du budget. Si vous en avez la patience, le courage et le temps, vous pouvez consulter sur mon blog (www.pumpernickel.fr) le compte-rendu préalable que j'ai fait de cette séance qui ressemblera à celle de l'an dernier, elle-même en tous points semblables à celle de l'année précédente. Car, mais est-ce une caractéristique alsacienne, la vie politique de proximité comme on aime à la nommer, se résume, tout du moins à Wissembourg, charmante petite sous-préfecture de Transylvanie septentrionale, à une sorte de succession de cérémonies plus ou moins rituelles durant lesquelles les officiants feignent de se plier à un jeu abusivement qualifié de démocratique durant lequel ils monopolisent la parole, laissant à leurs opposants les miettes d'un débat qu'il prétendent accaparer. Témoin ce qui s'est passé lors de la précédente édition du conseil municipal où, sur le thème de “ une phrase, une heure ”, le maire de Wissembourg, également 1er vice-président du conseil général, a joué une mauvaise pièce intitulée “ débat d'orientations budgétaires ”. De débat, il n'y en a pas eu, les conseillers d'opposition ne disposant ni d'un temps de parole proportionnel à leurs résultats électoraux (environ 1/3 des voix) ni des conditions matérielles adéquates pour préparer sérieusement la séance (ils reçoivent la convocation 4 à 5 jours avant le conseil municipal, délai minimum légal). Dans ce contexte que j’observe depuis 12 ans à la loupe d’un périodique maintenant bimestriel, il n’est pas surprenant que les meilleures bonnes volontés s’épuisent, que les talents se détournent de la chose publique et que la médiocrité l’emporte. C’est précisément ce qui se passe ici, et ce que ne vous diront probablement pas vos invités, plus intéressés par les reports de voix putatifs entre les virtualités du second tour des élections présidentielles. Habitués à devoir se contenter des phrases creuses et des banalités débitées sur le ton des sentences, ils ne manqueront pas de mettre en avant la spécificité de la région, en particulier son dialecte qui aura été longtemps le ciment de l’identité régionale. Comme vous n’êtes pas cruel, évitez de leur demander quelle(s) langue(s) parlent leurs enfants. C’est un bon indicateur de la sincérité du propos qui permet de relativiser les billevesées régionalistes qui ne manquent jamais de jalonner les discours des porteurs d'opinion. Pour ma part, je n'ai à ce sujet aucun complexe : nos enfants, issues d'un couple mixte néerlando-français sont parfaitement bilingues et ont entrepris, avec succès, des études aux Pays-Bas. Connaissant un peu les personnalités des uns et des autres, je suis en mesure d'affirmer que bien peu d'enfants de conseillers régionaux ou généraux sont capables d'avoir une conversation fouillée dans la langue de leurs grands-parents. Exit par conséquent l'identité linguistique régionale, à mon grand regret pour en avoir été un ardent défenseur il y a une bonne vingtaine d'années.

Qu'en est-il de la pratique politique quotidienne ? Si on voulait résumer la situation d'une phrase lapidaire, c'est Brennus qu'il faut convoquer et son désormais fameux “ malheur aux vaincus ! ”. Il ne fait pas bon sortir des normes et des valeurs dont la définition est d'ailleurs variable au gré des humeurs du parti dominant. Le temps du christianisme social est derrière nous et les incantations humanistes du président du conseil régional ne parviennent pas à faire illusion lorsque, dans les petites baronnies excentrées. C'est bien le débusquage de tout ce qui pourrait altérer l'image d'une région souriante où il fait forcément bon vivre qui est la règle. Une fois l'adversaire identifié peut alors commencer le long et patient travail de sape et de dénigrement qui le mettra hors course, permettant aux tenants du pouvoir de continuer à ronronner jusqu'à la prochaine alerte. Cette remarque vaut d'ailleurs au-delà des limites étroites du champ politique, je puis en témoigner de façon absolument catégorique. Ainsi, pensant que “ Pumpernickel ” chassait sur leurs terres, ce qui équivaut à une sorte d’aveu, les Dernières Nouvelles d'Alsace, au moins leur avatar local, ont-elles décidé de ne jamais écrire le nom de ce journal, y compris lorsque j'ai été l'objet d'une attaque judiciaire qui aurait pu être fatale à mon journal, à mes biens et à ma santé (attaqué en diffamation, j'ai écopé en appel de plus de 5 000 euros d'amendes diverses, signe que si l'on est maire d'une petite ville, on n'en a pas moins un égo gros comme ça ; heureusement, j'ai beaucoup d'amis qui se sont cotisés.). On appréciera ce comportement, sorte de variation moderne du damnatio memoria des Romains, à sa juste valeur.
Considérant qu'il ne faut rien faire qui puisse nuire aux harmonies municipale, départementale et régionale, cet organe de presse se fait le contempteur zélé d'une classe politique qui se distingue au niveau national par une inexistence qui confine au néant. Pas étonnant alors qu'il ait fallu attendre plus de 10 ans avoir de voir arriver le train TGV, et encore à quelle vitesse sur le tiers du parcours, une fois seulement que les collectivités auront, et c'est une première en France, payé bien cher l'heure et demie gagnée sur le temps de parcours. On pourrait multiplier à l'infini les exemples de retraites dans la précipitation auxquelles ces petites élites ont été contraintes, soutenant dans leurs fiefs des positions inverses de celles qu'elles votent “ à Paris ”. On rappellera pour triste mémoire le souvenir de ce député de la 8ème circonscription qui résumait ses interventions à la Chambre à une supplique annuelle en faveur des bouilleurs de cru pour s'enfoncer ensuite dans l'anonymat et le ridicule.
 
Si je vous livre ces quelques réflexions, c'est évidemment pour tenter d'alimenter une conversation qui doit à tout prix quitter les ornières dans lesquelles les clichés et les préjugés ont vite fait de l'embourber. Contrairement à tout ce que l'on croit, il existe en Alsace autre chose qu'un ministre alsacien (c'est le député de la circonscription de Wissembourg, mais il va la quitter pour aller chercher bonne fortune à Haguenau, signe que la fidélité doit probablement aussi être au programme), des fêtes folkloriques caricaturales et des locuteurs à fort accent germanique. En particulier des forces de contestation qui sont l'objet de toutes les mauvaises intentions et qui n'en poursuivent pas moins un combat inlassable et inégal, dont même Roland Ries, ancien maire de Strasbourg et sénateur du Bas-Rhin, en visite l'autre samedi sur les bords de la Lauter, s'étonnait au cours de la conversation que j'ai pu avoir avec lui. Je me tiens évidemment à votre disposition pour tous les renseignements complémentaires qui vous intéresseraient, mais je pars de la maison à 17h45, car je ne veux en aucun être en retard pour le conseil municipal, où je sais ma présence autant attendue que redoutée.

Bonne émission, et surtout bon courage lorsque vous entendrez tous ces lieux communs doctement énoncés par les spécialistes.

Il est toujours intéressant de comparer, et de s'interroger sur les réalités du changement, jusque dans ses moindres détails. Si les opinions sont connues sur ce qui se passe, ou  ne se passe pas dans les asemblées délibératives, le rappel de certains faits devraient remettre les pendules à l'heure surtout dans la salle de rédaction sise place de la République à Wissembourg. Gloser sur l'absence de débat contradictoire au conseil municipal lors de la communication dur les orientations budgétaires en faisant semblant de le regretter en oubliant de préciser que c'était déjà comme ça du temps de ceux que l'on regrette [ tellement qu'ils n'oublient de vous appeler publiquement par votre prénom ], c'est à la limite de l'omission. Et quand on est journaliste professionnel, c'est à la limite de la faute.

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